Fiche elaborée par Stefania Cavaliere, université de Naples, L’Orientale

Famille de langues et particularités linguistiques

Le hindi est une langue indo-européenne appartenant à la famille de langues indo-aryenne. Le mot « aryen » vient du sanscrit « arya » (cf. avestan : airya, vieux-persan : ariya), qui signifie « homme noble, honorable ».

L’indo-aryen se subdivise en trois états de son évolution : à partie de 1500 BCE, le vieil indo-aryen, constitué du védique et du sanscrit ; de 600 BCE à 1000 CE, le moyen indo-aryen appliqué au prakrits, et le néo-indo-aryen qui inclut les langues vivantes comme le hindi, le bengali, le marathi, etc.

Le hindi est la langue officielle de l’Union indienne, comme cela est exposé dans l’article 343 de la constitution approuvée en 1949. Selon le recensement de 2011, dans la confédération d’États constituant l’Inde, le hindi est la langue la plus parlée et la mieux connue (41 % de la population correspondant à 422 048 000 de personnes plus environ 200 millions de locuteurs dans la diaspora).

Le terme « hindi » vient du mot « hind » qui est le terme persan pour désigner l’Inde. Il vient lui-même du mot sanscrit « sindhu », signifiant « rivière », et référant au fleuve le plus important de la région. On ne sait pas quand le mot « hindi » a commencé à désigner la langue, quoique le poète Amir Khusrau (1254-1325) l’utilise avec cette signification.

Écriture

Selon la constitution, la langue officielle de l’Inde est le hindi écrit en écriture nāgarī (appelée aussi Hindī Nāgarī). Son alphabet vient de l’écriture devanāgarī, utilisée pour le sanscrit, avec l’adjonction de quelques consonnes permettant de produire les particularités phonétiques des mots empruntés ou dérivés de l’arabe ou du persan.

Extension chronologique et géographique

Le néo indo-aryen évolua après le début du xe s. CE. À cette période, les transformations, qui avaient déjà commencé dans la dernière phase du moyen indo-aryen, arrivèrent à leur terme, comme la perte du système des cas et la substitution de structures synthétiques remplaçant les structures analytiques. Ces transformations s’opérèrent de différentes manières, dans les différentes régions du nord de l’Inde, alors que les langues occidentales étaient en général plus conservatrices.

Au niveau socio-culturel, à partir du viiie s. avec l’invasion du Sindh, la conquête islamique de l’Inde amena inévitablement à une rupture entre les civilisations qui ont eu une influence sur toutes les productions culturelles des siècles postérieurs.

En particulier, les langues vernaculaires ont été progressivement employées comme des moyens littéraires pour transmettre des nouvelles attitudes religieuses et philosophiques. En identifiant le sanscrit comme la langue des hindous orthodoxes, la langue vernaculaire est devenue le véhicule pour transmettre les nouvelles approches dévotionnelles de la religion (par exemple, le bhakti et le soufisme). Dans cette période classique, quatre langues vernaculaires principales ont été utilisées dans l'Inde du nord et ont convergé en hindi en tant que ses dialectes littéraires (le brajbhāṣā, l’avadhī, le maithilī et le rājāsthānī), tandis que la langue moderne (basée sur la variante khāṛī bolī) a commencé à être élaborée dans une forme standardisée durant le xixe s.

Valeur symbolique

La valeur symbolique du hindi est contenue dans la formule « L’unité dans la diversité », qui est le même principe central de la nation indienne. Quoi qu’il y ait de multiples différences ethniques, religieuses et linguistiques, l’Inde a maintenu une unité culturelle, particulièrement en opposition aux dominations étrangères. À partir du xiie s., les conquérants musulmans ont appelé « hindawī » ou « hindī » les différents langues de leurs sujets du nord de l’Inde. Autrement dit, plus largement, le hindi se réfère au continuum linguistique qui couvre la ceinture hindie de l’Inde du nord, alors que, dans l’étroite perspective qui prévalut au xxe s. pour des raisons politiques, afin d’accentuer le fossé hindi/hindu-ourdou/musulman, le hindi a été identifié comme une forme sanscritisée de la langue.

Vecteurs d’influence culturelle

Historiquement, le hindi représente la lingua franca de la région comprenant l’Inde du nord moderne et le Pakistan. Il forme la base, à la fois du hindi nāgarī et de l’ourdou qui se différencient surtout en ce qui concerne leur lexique (sanscritisé pour le hindi et arabisé pour l’ourdou). La variante khāṛī bolī représente un point d’équilibre entre le hindi et l’ourdu, et n’a jamais été très populaire en tant que langue parlée. Avec cela, les dialectes littéraires mentionnés ci-dessus ont été principalement utilisés dans des buts littéraires jusqu'au xxe s., tant pour les chansons populaires religieuses que pour la poésie courtoise.

Évolution de la langue, différences idiomatiques

La langue dialectale appelée hindi, ourdou ou hindoustani, qui a été utilisée pendant des siècles, a commencé à se différencier au long du xixe s. pour des raisons politiques et religieuses. Dans cette dernière phase de son développement, avec la revendication pour l’indépendance du régime colonial, la langue est devenue un symbole de l’identité nationale et s’est progressivement différentiée d’une part en « hindi », qui est devenu la langue de l’Inde, et d’autre part en « ourdou », celle du Pakistan. Dans un registre linguistique dialectal, cette différentiation est quasiment absente, mais s’accentue considérablement dans des registres relevés.

Corpus utile à l’étude du lexique de la paix et outils de travail

1. Sources lexicographiques (dictionnaires monolingues, étymologiques, et dictionnaires de synonymes)

Je propose d’utiliser des dictionnaires provenant de milieux composites et variés pour examiner comment la notion de paix évolue depuis les termes classiques présents dans le sanscrit, puis s’élargit pour englober de nouvelles idées entrant dans le cadre conceptuel, avec les conquêtes étrangères et la rencontre avec les autres traditions culturelles et linguistiques (arabe, persane, anglaise).

2. source textuelles sur le concept de paix

2.1. Textes historiques décrivant le concept de paix comme une stratégie politique en tant que arrêt de la guerre et, plus tard, comme un état idéal de coexistence pacifique du peuple.

J’examinerai ici une sélection de textes composés dans les cours de l’Inde du nord entre les xvie et xviiie s. (pour la plupart écrits dans le dialecte littéraire appelé Brajbhāṣā), qui appartiennent au genre des traités de morale et de politique (nītiśāstra) et concernent l’éducation des princes, à propos de la stratégie à tenir pour la guerre et pour la paix, et dans et les voies de la diplomatie recommandées aux ambassadeurs.

2.2. Traités d’esthétique concernant les émotions de la paix (śānta rasa) produites par une œuvre d’art

Le thème de la paix a été longuement traité par les philosophes indiens, principalement préoccupés par la paix spirituelle et par l’accomplissement du but suprême de l’existence, à savoir l’annihilation des désirs et la libération du piège du cycle des renaissances.

Avec cela, on propose aussi une enquête approfondie concernant l'état mental de paix dans la spéculation esthétique de l'Inde. Selon les théories classiques, lorsque nous contemplons ou écoutons une œuvre d'art – qu’il s’agisse d’une poésie, d’un drame, d'arts figuratifs ou d’une œuvre musicale - nous pouvons jouir d’un mode spécifique de conscience dite "en paix", qui ressemble au bonheur suprême venant de l'accomplissement de l'Absolu.

Je propose une sélection de textes littéraires des xvie et xviie s. (principalement écrits dans le dialecte littéraire brajbhāṣā), lequel traite de spéculation poétique (alaṅkāraśāstra) et se concentre sur la genèse de cette paix de l’esprit esthétique er sur les implications psychologiques pour ceux qui l’ont expérimentée.

Bibliographie

A. Dictionnaires

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  • Dasa, Syamasundara. Hindi sabdasagara. Navina samskarana. Kasi: Nagari Pracarini Sabha, 1965-1975.
  • Fallon, S. W. A new Hindustani-English dictionary, with illustrations from Hindustani literature and folk-lore. Banaras, London: Printed at the Medical Hall Press; Trubner and Co., 1879.
  • Shakespear, John. A dictionary, Hindustani and English: with a copious index, fitting the work to serve, also, as a dictionary of English and Hindustani. 3rd ed., much enl. London: Printed for the author by J.L. Cox and Son: Sold by Parbury, Allen, & Co., 1834.

B. Textes littéraires (sources primaires)

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  • Keśavadāsa, Rasikapriyā, in Keśava-Granthāvalī, Khaṇḍa 1, Viśvanātha Prasāda Miśra (saṃpādaka). Ilāhābāda: Hindustānī Ekeḍemī, 1954, pp. 1-93.
  • Bhikhārīdāsa, Kāvya Nirṇaya, in Bhikhārīdāsa granthāvalī, Viśva Nāth Prasād Miśra (saṃpādaka). Kāśī: Nāgarī Pracāriṇī Sābhā, 1956, dvitīya khaṇḍa, pp. 1-344.
  • Bhikhārīdāsa, Rasasārāṃśa, in Bhikhārīdāsa granthāvalī, Viśva Nāth Prasād Miśra (saṃpādaka). Kāśī: Nāgarī Pracāriṇī Sābhā, 1956, pahlā khaṇḍa, pp. 3-85.
  • Padmākar, Jagat vinod. Banāras: Bhārat Jīvan Pres, 1902.
  • Saiyad Gulām Nabī Raslīn, Rasaprabodha, in Raslīn Granthāvalī. Vārāṇasī: Nāgarī Pracāriṇī Sābhā, 1969, pp. 1-355.

Pour citer cet article

Stefania Cavaliere, "Hindi", Les mots de la paix/Terminology of Peace [en ligne]. Traduit par Sylvie Denoix. Mis en ligne le 14/04/2015, consulté le